Dans les nuits
Eric Ferrari
(collection poèsie)
Eric Ferrari passe dans ce livre, d’une voix polyphonique, sa rugueuse observation de l’art funéraire étrusque, son
écoute tendue du silence montant du fond des temps et des êtres désertés de vie. Une rumeur naît dans le cours de
ce que l’auteur nomme « fascination patiente », « dépouillement fulgurant », onde charriant Orphée et des ...ouvriers puis des pilleurs, les mendiantes du chant déchiré... Dans l’orage infini de l’homme qui chemine, le poète compose,
avec une intime pudeur, la marqueterie d’un lieu où il accepte de s’égarer, fils fantôme.
Eric Sénécal (4ème de couverture)
Ce livre trouve sa principale origine dans ma découverte des fresques étrusques. Un certain état de fascination patiente, de dépouillement fulgurant, a été le fil conducteur dans cet espace qui est comme l’écrit Stephan Steingräber (1) une « sorte de zone de transition entre le monde des vivants et celui des morts. »
C’est dans la confrontation féconde du lieu et des époques que mes mots ont cherché leur raison d’être. Dans les nuits se veut la retranscription d’une telle traversée. Au fur et à mesure de l’écriture s’est imposée la figure d’Orphée, en effet il n’est pas rare de le rencontrer dans l’art étrusque. C’est pourquoi j’ai introduit dans le texte des extraits du livret de l’Orfeo de Monteverdi, souhaitant ainsi souterrainement créer de nouvelles perspectives.
Une fois encore c’est dans le frottement des approches que j’ai pu ouvrir, je l’espère, mon travail, et aborder d’autres rivages. La voix, plurielle par nécessité de rendre compte, en fut le médium.
Eric Ferrari
(1) Stephan Steingräber, Les fresques étrusques, Citadelles & Mazenod, 2006.
Extraits :
deux rives est-ce
suffisant
pour accomplir
le pas de
côté ?
il faudrait
s’ar mer des connaissances
les plus rudimentaires
Tombe provinciale
SOLEIL QUI TRANSFORME MES
NUITS EN JOURS // feu et sacrifice
de l’intime, nous sommes égaux,
dégraissés, rendus à cette dévotion
dévorante d’animal consentant aux
présences rugissantes // EN CE
LIEU QUELQUEFOIS // d’une
rive antérieure, nous passons muni de
frondes, au pays des cyprès //
APRÈS LA PEINE APRÈS LE
MALHEUR
la tête se renverse // quelle révélation
nécessite l’angle brisé ? // de la
pointe du pied, on se prépare à pivoter
// telles des fleurs charnelles,
les mains signent sur les lèvres des
convives // elles appellent le dénuement
du fruit // elles invoquent l’accueil
// l’air est une conversation
ondoyée, un partage gestuel qui mène
à une figue offerte, et comme nous
tournons autour, dans une nudité sans
encombres
(...)