" Cadastre " est un livre vitrine dans lequel les éditions clarisse présentent dix poètes et une créatrice déjà inscrits au catalogue à travers des textes inédits afin de permettre de découvrir le climat de son travail.
La question de la résistance, quelque sens qu'on donne à ce mot, est essentielle pour tout être humain. Elle demeure un fondement de l'existence même de la poésie. Non seulement dans son aperçu historiquement révélateur des temps de guerre, mais bien dans une acception plus humaine, moins naufragée, une résistance du corps dans un courant contraire, de branche abandonnée à la rivière sur laquelle s'aimantent plantes aquatiques et déchets humains, à moins que ce ne soit quelque chose proche du vol des goélands luttant le long des estrans, à contre-vent, vers une destination d'eux seuls connue, avec une volonté par eux seuls motivée.
La destination, les poètes n'en connaissent rien. Mais ils sont volontaires.(...)
Extraits : Onze esquisses de regards Franck Cottet
7.
Tu dis les yeux ça ne sait pas mentir, les yeux toujours déshabillés, même à contre jour.
8.
Ce que tu vois au bout de tes yeux sur le pas de ta porte, de l’autre côté de la fenêtre, tu ne sais pas si ça peut tenir dans les mots tu ne sais pas. Tu essayes avec le chat mais tu ne sais pas.
Les actes mineurs Eric Ferrari
Le carré ensoleillé d’un parquet grinçant de ta présence déroutée. Fenêtre ouverte, on aperçoit de splendides jardins en jachères.
Une fois. Un instant. Tu entends le vol bleu des hirondelles comme les ratures du possible.
(Reconstitution de la solitude)
Notre surcroît d’être sera une petite neige qui réduira tout à un néant scintillant d’étincelles fragiles, comme ta respiration après l’épreuve.
Je suis mon propre matériel d’investissement. A quatre pattes, je visite mes noyaux durs, cherchant les quelques morceaux de gratitude jetés là par un visiteur désobéissant, nourricier.
La moquette est tachée, les meubles absents, le ciel bancal.
(Conditions pour une grâce sans merci)
L’entrebâillée Eric Sénécal
O vous
présente en mon absence vous
seule en moi
disiez me voici Vous me marquiez
de taches infiniment rouges dans mon sommeil
ce charme sous la pluie sa branche
fraîche dégoulinante c’est vous souriante
vos yeux dans cette branche de pluie
ce que vous êtes par mauvais temps
ce que vous faites du temps d’ennui
de l’œil votre œil son tournoiement de feuille
dans l’arbre plus jeune
au printemps dans un hêtre madame Votre
œil et son trait facile sur l’épaisseur
de ce ventre bombé humide
(…)
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