On ne traverse pas « Le parfum des pierres aveugles » sans bouleversement. Isabelle Guigou exerce dans ce livre un impossible retour vers l’enfance, éprouve ce qui reste, convoque ceux qui ont franchi le temps, frôle ceux qui s’en sont affranchi.
Dans la sérénité de qui sait douter du chemin parcouru, elle retourne le temps, accommode son regard agrandi sur ce qu’était cette autre vie, l’enfance. C’est à Pézenas, à Montmartre, et partout ; c’est Isabelle Guigou, poète, puis nous-autres, hélés, nous retrouvant brusquement dans notre propre trame, reconnaissants, nous reconnaissant à mesure qu’elle, poète, s’éloigne sans disparaître tout à fait.
Avec une retenue et une assurance peu courante dans la poésie d’aujourd’hui, Isabelle Guigou livre « Le parfum des pierres aveugles » comme une empreinte. Elle révèle comme il s’agit d’« être entier dans le vent », « Entière / en terre enracinée », d’être, après ce qui a fui.
Par la grâce d’une écriture s’affirmant au fil des livres, Isabelle Guigou requière ici une langue au tremblé maîtrisé, aux modulations assurées, faisant apparaître le mystère même qui assure de notre présence, « l’émotion ardente à vivre l’irrémédiable ».
Extraits :
M’assurer que tout est encore en moi :
Les bruits assourdis du cours, par delà la porte épaisse, l’odeur
humide des pierres, celle âcre de la vieille rampe en fer
Rouillée
Cet amour entier d’enfant, exempt de toute critique (ces mots
durs que l’on voudrait prononcés par un autre n’ont encore oxydé la tendresse n’ont encore écaillé le tableau que je retrouve ici (ailleurs, au présent, toile vide ou au tracé à peine esquissé si bien que je peine à deviner une forme))
L’impatience d’aimer
M’assurer que rien n’est passé mais contenu
Finalement tout cela au-dedans de mon corps.
Paliers abandonnés aux chiures d’oiseaux, crevés :
Les portes des appartements bâillent comme des gueules
ouvertes sur quel cri
Ce qui me sépare de ces jours où nous nous tenions serrées
sur les marches, là, dans l’auréole de lumière que nous lançait la sainteté d’une fenêtre
Rien d’ange cependant nous lancions nos balles contre les
murs, nos mots de gosses, moqueurs, nos grimaces
Ce qui me sépare
A se demander où est passé l’amour.
(...)
100 pages, dos carré cousu collé
Dépôt légal : Quatrième trimestre 2007
ISBN : 978-2-912852-20-5
éditions clarisse 170 allée de Sainte-Claire 76880 Martigny
Prix de vente 10 Euros